Lire c’est grandir
J’ai peur de grandir
Donc j’ai peur de lire…
Et je n’ose pas me lancer dans cette grande aventure.
J’ai déjà croisé plus d’un élève dans ce cas sur mon chemin.
Comment sait-on qu’un enfant a peur de grandir ?
Le constat vient parfois des parents.
D’autres fois, je m’en rends compte au travers de discussions avec l’enfant… et les parents confirment après.
Je suis la championne des questions saugrenues 🙂 Par exemple :
– « Si j’étais une fée avec une baguette magique et que je pouvais te transformer en animal. Tu choisirais quoi ? »
Les réponses du style « Un bébé chien » ou « un tout petit chaton » me mettent la puce à l’oreille.
– « Tu préfères ta classe de cette année ou celle de l’année dernière ? ».
J’ai parfois des réponses du genre « A la maternelle c’était mieux, on jouait tout le temps, y’avait pas de travail » (Je sais que ce n’est pas vrai hein, les collègues de maternelle ! 😉 )
– « Si c’était possible, tu préférerais redevenir un bébé, rester comme tu es ou devenir tout de suite un papa / une maman ou un grand-père / une grand-mère ? »
Parfois ce désir de redevenir un bébé se retrouve dans les dessins libres des enfants. (Lien vers le site du Dr Daniel Haué, plus d’infos plus bas)
Comment aider les enfants à dépasser cette peur ?
Identifier la difficulté et rallier tout le monde
A partir de là, je trouve qu’une bonne partie du chemin est déjà fait.
Je me souviens notamment d’une petite fille de 7 ans qui, avec l’accompagnement de son entourage (parents, enseignants… et moi) a réussi à dépasser le problème au moment de l’arrivée d’un petit frère.
Devenir grande prenait alors tout son sens, pour s’occuper de lui… et lui lire des histoires !
Mon projet d’aide a été simple : arriver à lire une histoire, une vraie, dans un vrai livre, toute seule…. Après quelques semaines de travail, elle était prête. Elle était capable de lire une histoire, seule. Elle a amoureusement emmené le 1er recueil de textes progressifs des alphas, (avec des sons simples uniquement) pour le lire à son petit frère. Grand moment. Et des progrès fulgurants en classe.
Bon, parfois, l’arrivée d’un petit frère ou d’une petite sœur a l’effet inverse : ce bébé tout petit accapare une bonne partie de l’attention de papa/maman. Je veux qu’on s’occupe de moi, donc il faut que je reste petit (voire que je redevienne encore plus petit)
Ouvrir le débat avec des livres bien choisis
Plusieurs possibilités (A vous de faire le choix en fonction de vos envies et de ce qui semble le mieux coller à l’enfant que vous voulez aider) :
- Une lecture offerte : juste comme ça, pour le plaisir, pour que ça chemine dans la tête de l’enfant sans le brusquer. Laisser des silences pour faire émerger les questions… ou pas. Laisser le livre traîner nonchalamment pour peut-être en reparler à l’occasion… ou pas.
- Le lire ensemble et faire des pauses pour discuter. Pour ouvrir une réelle discussion, évitez les questions fermées (qui amènent des réponses oui/non). Des propositions d’amorce : Tu en penses quoi toi ? Et toi, tu aurais fait/pensé/dit quoi à sa place ? Ou alors reformuler ce qui vient d’être lu et laisser en suspend pour que l’enfant poursuive (Par exemple : Untel se demande ce que ça fait de grandir…….)
- Le lire sans commenter. Laisser mûrir. Entamer une discussions sur le sujet plus tard.
- Pour les plus jeunes : Après la lecture du livre, proposer de dessiner ce qui leur a parlé, ce qu’ils veulent retenir…
Soyez inventifs !
Le but n’est pas de convaincre l’enfant de quoi que ce soit mais plutôt d’ouvrir un espace de parole, d’échange, de réflexion… pour se libérer et sentir qu’il est soutenu quoi qu’il arrive.
Idées lecture pour les plus jeunes
Pomelo grandit – Ramona Badescu, Benjamin Chaud
Pomelo, le petit éléphant grand philosophe… pour se poser des questions et réfléchir sur les sujets qui comptent. Et là pour le coup, il a choisi le sujet qui nous intéresse : Grandir. Et ce qui est top c’est justement le questionnement. L’idéal pour engager la conversation
Le monde paraît plus petit ce matin. Ou serait-ce Pomelo qui a grandi ? Le format du livre nous le confirme en tout cas ! Tout heureux de ce constat, il est bientôt assailli de questions sur le monde qu’il quitte et celui qui l’attend. Une période charnière mêlée de curiosité, d’appréhension, d’impatience et de doutes. Il est assez grand maintenant pour oser “la grande aventure” !
Le Petit Bateau de petit ours – Eva Bunting, Nancy Carpenter
Plus imagé que le précédent. Pas mal si on veut y aller en douceur.
Un petit ours, dans un petit bateau… jusqu’au jour où il faut se rendre à l’évidence, petit ours a grandi et le bateau est trop petit. Pas le choix, il va falloir s’adapter, trouver de nouvelles solutions… même si au départ on n’en a pas trop envie. Transmettre son petit bateau à un plus petit (clin d’œil pour les enfants qui ont des petits frères/sœurs) et s’en construire un plus grand.
Pue-du-bec et la petite chips de trop – Lili Pissenlit, Emmanuelle Lepicard
Grandir, se confronter au monde extérieur et aux autres peut faire peur quand on est rikiki. Mais se renfermer dans sa coquille, est-ce la solution ? Ben non ! Et rien ne vaut l’amour d’une maman, dans ces cas-là, pour être rassuré.
Idée lecture pour les plus grands
J’ai peur de savoir lire – Olivier de Sominihac
J’ai découvert ce livre suite à un entretien avec la maman d’un « petit-grand garçon » de 8 ans. Accéder à une lecture autonome c’est accepter de se détacher de maman… et c’était justement là que ça bloquait pour lui, comme pour le héro de ce petit roman :
Changer, devoir, compter, jouer, s’élancer, persévérer, délaisser, partir, parler, grandir : en dix chapitres, Olivier de Solminihac nous invite à suivre Stéphane. En troisième année d’école primaire, le petit garçon devrait savoir lire « tout seul ». Les apprentissages de base sont finis et normalement, les enfants découvrent les plaisirs de la lecture autonome. On sait que ce n’est pas le cas tout le temps, ni pour tous les enfants. Stéphane, au sein de sa classe, entre Sofia et Georges-Louis, les bons élèves, ou Hamadou qui fait rêver en récitant, ne se sent pas à la hauteur. Le jour de la rentrée, alors qu’il est épaulé par sa maman qui met tout en œuvre pour l’aider, il est inquiet. Dès les premières mauvaises notes, il éprouve sa difficulté dans le regard de sa maman. Ce lien très fort, mère-fils, mesure et dépasse le problème puisque la maman avec intelligence et sensibilité propose des mises en jeu de l’apprentissage. Jeux de découverte du monde, lectures alternées, l’auteur par le biais de cette mère aimante donne à tous quelques pistes d’aide. Très pédagogiquement, il met dans la bouche de Stéphane, quelques difficultés connues de l’entrée en lecture : confusion des lettres Girafe et Carafe, perte du sens et à travers le personnage de la maman, il ouvre des solutions.
Lire les idées d’un spécialiste
J’ai trouvé des documents intéressants sur « le syndrome de Peter Pan chez l’enfant » sur le site du Dr Daniel Haué, pédopsychiatre à Compiègne.
Le syndrome de Peter Pan n’est pas un syndrome reconnu en psychologie clinique. Il a été introduit par un psychanalyste, Dan Kiley, et pour les ados et adultes uniquement à la base. Le Dr Daniel Haué nous parle lui, des enfants qui pourraient également être concernés.
Chacun se fera sa propre idée sur la pertinence ou non du concept.
Cependant dans ces documents il y a vraiment des informations et des propositions d’aide intéressantes pour ces enfants qui ne veulent pas grandir. Il mérite, je pense, qu’on s’y penche.
Pour plus d’infos, vous pouvez lire ce livre :
Le refus de grandir – Le syndrome de Peter Pan chez l’enfant de Daniel Haué
Hyperactivité, troubles de l’attention et du langage, retard scolaire, dyslexie, énurésie, angoisses…
Au cours de sa pratique, le pédopsychiatre Daniel Haué a constaté un refus de grandir chez les enfants atteints de l’un de ces troubles.
Suite à une grande peur, l’enfant bloque son potentiel, s’enferme dans une bulle imaginaire et décide de rester ou de redevenir un bébé.
C’est ce que l’auteur a appelé « le syndrome de Peter Pan chez l’enfant », en référence à la pathologie décrite chez l’adulte par le psychologue américain Dan Kiley.
Ce livre repose sur de nombreux témoignages vivants et concrets. Il permet au lecteur d« assister » à des consultations et montre un grand nombre de dessins réalisés par ces jeunes patients dont certains révèlent des secrets de famille qui n’avaient pas été portés à leur connaissance.
L’auteur apporte ici de nombreuses clefs aux parents pour leur permettre d’aider leur enfant à se prendre en charge lui-même pour grandir, s’épanouir et réussir.
Et si ça ne suffit pas, consulter
Le but n’est pas de s’inventer psychologue.
Je pense que le fait de prendre conscience du problème et de mettre en place certaines petites astuces suffit parfois à débloquer la situation.
Si ne n’est pas le cas, il peut s’avérer utile de consulter :
- Un psychologue : pour essayer de débloquer tout ça avec une personne spécialisée et neutre
- Et/ou un orthophoniste : pour s’assurer qu’il ne s’agit pas aussi d’un trouble des apprentissages
Si vous cherchez d’autres pistes pour aider un enfant face aux difficultés de lecture…
Vous pouvez aller consulter cet article récapitulatif :
Aider les enfants en LECTURE : Grand récapitulatif
Si vous avez d’autres informations ou documents à proposer sur ce sujet, ça m’intéresse !
Mille mercis pour tous vos articles: riches, pertinents, accessibles et opérationnels!